Valentin Haüy : le premier 'instit' des aveugles
Emancipateur des aveugles, inventeur, à la fin du XVIIIème siècle, de leur premier matériel de lecture et fondateur de leur première école, Valentin Haüy faisait rimer scolarité et dignité.
Valentin Haüy en cinq dates
1745 : naissance à Saint Just-en-Chaussée (Picardie)
1784 : Valentin Haüy apprend à lire à un adolescent de 16 ans grâce à des textes imprimés en relief
1786 : Création de l’Institution des enfants aveugles financée par une société philanthropique
1806 : Départ pour Saint-Pétersbourg où il fonde une école pour aveugles
1822 : Décès à Paris, enterrement au cimetière du Père-Lachaise
A l’origine, rien ne destine Valentin Haüy à jouer un rôle de précurseur dans l'éducation des enfants aveugles. Né en 1745, en Picardie, il entreprend des études classiques à Paris. Passionné par les langues, il pratique le latin, le grec, l’hébreu ainsi qu’une dizaine de langues vivantes. Il gagne sa vie comme traducteur au ministère des Affaires étrangères. Homme du siècle des Lumières, il s’intéresse à ceux que l’on appelle alors les infirmes et notamment au travail que l’abbé de l’Epée mène avec les sourds-muets.
Les jalons sont désormais posés. Il ne manque plus qu’un coup de pouce du destin pour révéler la vocation de Valentin Haüy. Une image, tout d'abord, va le choquer et le hantera pendant des années. En 1771, alors qu’il parcourt la foire Saint-Ovide, située sur l’actuelle place de la Concorde, à Paris (à l’époque place Louis-XV), il tombe en arrêt devant la mise en scène d’une dizaine d’aveugles auxquels on fait porter des vêtements ridicules et des lunettes opaques pour leur faire jouer "une musique discordante qui semblait exciter la joie des assistants". Valentin Haüy se promet alors de tout faire pour rendre leur dignité aux aveugles.
Une rencontre décisive
Il lui faudra cependant attendre 13 ans pour que germe enfin l’idée qui lui permettra de tenir sa promesse. Ce jour de mai 1784, Valentin Haüy glisse une pièce dans la sébile d’un aveugle, sous le porche de l’église Saint-Germain-des-Prés, à Paris. Il marque un temps d’arrêt lorsque l’adolescent de 16 ans, après avoir touché la pièce, lui lance : "Vous avez cru me donner un sous tapé, et c'est un écu que vous m'avez donné !". Ce jour-là, Valentin Haüy imagine que c’est le toucher qui peut donner aux aveugles l’accès à la lecture, donc à la connaissance et à la dignité.
C’est avec Lesueur, l’aveugle aux doigts agiles, que Valentin Haüy va mettre au point sa méthode. Il utilise des feuilles de papier cartonné et des lettres de typographe de grande taille pour imprimer des reliefs. Du bout des doigts, Lesueur apprend à lire, et même à compter. Une société philanthropique confie alors à Haüy la charge de l’instruction d’une douzaine d’aveugles. C’est ainsi que naît l’Institution des enfants-aveugles, qui connaît une forme de consécration en étant reçue par le roi à Versailles en décembre 1786. L’enseignement y est gratuit et il s’adresse aussi bien aux filles qu’aux garçons. La même année, Valentin Haüy publie son "Essai sur l'éducation des aveugles".
Une fin de vie difficile
Après la Révolution, l’Institution va connaître les vicissitudes de cette période troublée. Valentin Haüy doit démissionner en 1802. Suivront des années difficiles, puis le départ pour Saint-Pétersbourg, en 1806, à l’appel du tsar Alexandre Ier. Sur place, il fonde une école pour aveugles qu’il dirigera pendant 11 ans.
Rentré à Paris, en 1817, à l’âge de 72 ans, il attendra la veille de sa mort pour être autorisé à pénétrer à nouveau dans la maison qu'il a fondée et qui porte désormais le nom d'Institution royale des jeunes aveugles. Parmi les élèves, un jeune garçon de 11 ans : Louis Braille. Quelques années plus tard, ce dernier proposera les bases d’un système phonétique en relief qui portera finalement son nom. Valentin Haüy ne verra pas cette consécration de la mission qu’il s’était assigné. Il s'éteint le 19 mars 1822.
Le site de l’association Valentin Haüy : http://www.avh.asso.fr/